Prologue du Zéphyr n°18 : c’est quand la révolution pour le vivant ?

Découvrez l’édito du Zéphyr n°18 Zones humides : eau secours.

Avons-nous vu récemment la foule battre le pavé sur des kilomètres pour lutter contre « l’action délibérée de destruction du vivant », selon l’expression employée par l’activiste Camille Étienne ? Tout de même, les statistiques devraient nous affoler. En tout cas nous pousser à nous mobiliser massivement contre les pollueurs et tueurs d’espèces, non ?

Reprenons. 69 % des animaux vertébrés ont disparu depuis 1970. En trente ans, 80 % des insectes ont péri en Europe. Ce qui a fait chuter le nombre d’oiseaux sur le continent, en particulier…  Et nous faisons mine de regarder ailleurs, de ne pas nous en préoccuper, alors que cela nous touche directement !

Plus de zones humides, plus d’animaux

Oui, c’est business… as usual. Nous continuons d’abattre les arbres, et donc des zones de nidification juste pour construire des autoroutes, nous créons des barrages au niveau des cours d’eau, ce qui empêche les grands migrateurs de vagabonder, comme ils en ont besoin pour se développer. Nous asséchons les rivières ainsi que les zones humides, mille fois plus efficaces que les mégabassines que certains réclament. En l’occurrence, les marais et les tourbières ont été rayés de la carte au fil des décennies, c’est dramatique. La moitié des sites en France a disparu entre 1960 et 1990. Parmi les zones humides évaluées entre 2010 et 2020, quatre sur dix ont été dégradées et polluées, en raison de notre activité.

Les humains prennent toute la place

Le docteur en histoire Rémi Luglia, dans son livre Vivre en castor (voir plus loin), explique à quel point « les êtres humains transforment l’écosphère en profondeur, en dégradant sa diversité et ses fonctionnalités, en limitant son expression spontanée, en remettant en cause ses capacités adaptatives et évolutives, en réduisant les espaces non ou peu soumis aux influences anthropiques ». Et d’ajouter : « Les humains prennent toute la place et ne laissent que des miettes d’espaces et de ressources aux autres vivants ».

Alors c’est quand la révolution ? Elle est là, la colère ? / Philippe Lesaffre