Maire de Moloy en Côte-d’Or depuis 2014, réélu en 2020, Florian Paquet revient sur cette période si particulière, un peu plus d’un an après le début du premier confinement en France : comment a-t-il vécu la pandémie et quelles leçons en tire-t-il ?
En 2015, nous avons discuté avec Florian Paquet qui venait d’être élu à la mairie de Moloy, non loin de Dijon. L’idée à l’époque : recueillir des témoignages de jeunes élus aux quatre coins de la France pour comprendre leur démarche, leur engagement (à relire ici).
« Les maires arrivent à s’adapter et à trouver des solutions »
Plus de six ans plus tard, douze mois après sa réélection en 2020 dans un contexte de pandémie, nous avons repris contact avec Florian Paquet, aujourd’hui également vice-président de la communauté de communes des vallées de la Tille et de l’Ignon (Covati), en charge de la gestion des déchets et de la transition énergétique.
Au Zéphyr, il partage son ressenti sur la période actuelle, lui le premier magistrat d’une petite commune rurale d’un peu moins de 250 personnes. Au chevet de leurs concitoyens, souvent “sans l’aide de l’État” comme il le déplore, “les maires arrivent à s’adapter et à trouver des solutions”, estime-t-il.
Le Zéphyr : Comment se passe cette période pour vous ?
Florian Paquet : Nous faisons avec. Nous avons dû, autant que les autres communes, annuler certaines animations et manifestations, comme les festivités, l’an dernier, du 14 juillet, ou encore le repas des aînés en janvier. Mais nous nous sommes bien adaptés, et tout s’est fait assez naturellement. Nous avons par exemple annulé le spectacle de fin d’année pour les enfants, mais un père Noël est passé dans les rues pour saluer les plus jeunes, ravis de le voir tout en restant chez eux. Pour la cérémonie du 11 novembre, nous l’avons maintenue, mais sans public, les habitants pouvaient la suivre sur la page Facebook de la commune.
« Les gens en ont marre de la Covid-19 »
Néanmoins, Moloy est située en milieu rural, et le confinement a dû être moins compliqué à vivre que pour les habitants des villes, comme à Dijon. Ici, nous avons des extérieurs, des jardins… Par ailleurs, peut-être en raison de cette localisation, nous avons été plutôt préservés en ce qui concerne le nombre de contaminations, même si je n’ai pas forcément connaissance de tous les cas positifs. Si la métropole dijonnaise a été particulièrement touchée, nous n’avons eu que quelques cas de malades, à Moloy. Personne n’a été hospitalisé, à ma connaissance. Une habitante est toutefois décédée, elle possédait ici une résidence secondaire.
Avez-vous ressenti du stress, de l’angoisse, de la lassitude autour de vous ?
Effectivement, certaines personnes âgées ont pu être angoissées au début de la crise sanitaire, au début du printemps 2020. Un an plus tard, j’observe plutôt de la lassitude. Les gens en ont marre de la Covid-19. Il est possible que certaines personnes, qui avaient été vigilantes lors de la première vague, aient tendance un peu à se relâcher. Les plus de 80 ans sortent peut-être davantage que durant le premier confinement, parfois sans masque. Je précise que le port du masque, s’il est obligatoire en mairie, n’est pas obligatoire dans les rues de la commune, contrairement à Dijon, par exemple. Mais cela est logique, nous ne croisons pas 50 personnes sur le trottoir…
Forcément, vous avez dû vous adapter aux conditions particulières…
Tout à fait. La période électorale est arrivée en plein milieu de la pandémie. Le vote a eu lieu mais il a fallu attendre le mois de juin 2020 pour que les membres de l’équipe municipale s’installent vraiment et démarrent le travail. Aussi, nous avons perdu du temps sur les premiers dossiers que nous voulions lancer pendant le mandat.
Nous avons été accaparés par la gestion de la crise sanitaire. Et il a fallu gérer sans l’aide de l’État, qui nous a laissés en rase campagne, notamment par rapport aux masques. On a mis du temps à nous en vendre. Ainsi, au départ, nous avons dû faire avec les moyens du bord. La mairie a acheté du tissu, et des volontaires de Moloy ont confectionné des masques artisanaux. Chaque habitant en a reçu deux. Les élus s’adaptent, dépannent et trouvent des solutions.
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« Il ne faut pas compter sur l’État »
Qu’avez-vous appris au cours de ces derniers mois ?
J’ai appris en premier lieu qu’il ne fallait pas compter sur l’État, qui n’arrête jamais de complexifier les règles. Je pense notamment aux dossiers de subventions. Par ailleurs, on manque d’interlocuteurs. Il faudrait que l’État puisse être un facilitateur ; or, c’est tout l’inverse qui se produit.
Qu’en est-il de la baisse des dotations ?
C’est une réalité, mais un plan de relance a été lancé. Il y a des subventions qui sont sur la table. Or, elles ne sont pas adaptées au milieu rural. Je pense notamment aux projets de performance énergétique en ce qui concerne les bâtiments. C’est très utile, mais cela concerne plutôt les villes. De notre côté, nous avons plutôt besoin d’entretenir les routes et de développer les services de proximité.
« Entraide et commerces de proximité nécessaires »
Qu’avez-vous retenu par ailleurs de cette période ?
Dans notre commune, il n’y a pas de commerce, et nous sommes obligés d’aller en grande surface. Or, nous avons besoin de boutiques de proximité… Des camions passent dans notre commune : nous avons un boulanger, un fromager, un boucher, un épicier qui s’arrêtent chez nous. Autant de commerçants qui ont été pris d’assaut durant les confinements. J’espère qu’il en restera ainsi. Nous avons réellement besoin de cette proximité. L’été dernier, nous avons par ailleurs organisé un marché de producteurs locaux, et j’aimerais recommencer au printemps.
En second lieu, au cours de ces derniers mois, nous avons beaucoup parlé de notre besoin de solidarité et de la nécessaire entraide envers les plus fragiles (les aider pour les courses, notamment). J’espère que nous nous en souviendrons.
Comment faire en sorte que cela ne retombe pas justement ?
Il faut essayer d’entretenir tout ça. La mairie peut inciter les gens à se manifester quand ils en ont besoin et compter sur les habitants volontaires pour apporter leur aide. La mairie a vraiment un rôle de facilitateur… / Propos recueillis par Philippe Lesaffre