Représentation des personnages féminins dans les jeux vidéo, place des femmes dans les métiers du développement… Comment progresser dans le bon sens sur les questions de mixité dans le monde du jeu vidéo ? La développeuse web Noélie Roux, de l’association Game’Her, apporte quelques pistes de réflexion.
Cet article est extrait du Zéphyr n°10 « Jeux vidéo : gagner avec l’art et la manette« . Découvrez son sommaire, passez commande pour soutenir la rédaction, 100 % indépendante.
Le Syndicat des éditeurs de logiciels de loisirs le montre : parmi les amateurs du dixième art, près d’un joueur sur deux est une gameuse. Pourtant, certains préjugés ont (encore) la vie dure sur la place des femmes dans le milieu du jeu vidéo. Comment les contrer ? Quelles actions mettre en place pour que toutes et tous puissent jouer et évoluer en toute sérénité, loin de tout sexisme ? Et comment batailler contre le syndrome de l’imposteur et inciter celles qui le souhaitent à toquer à la porte de studios ou de se lancer dans une carrière de création ou de développement ? Le Zéphyr a interrogé Noélie Roux, présidente de l’association Game’Her.
« Le développement n’est pas qu’un milieu masculin »
Le Zéphyr : Game’Her n’est pas votre première association, d’où vient votre engagement ?
Noélie Roux : Je suis développeuse web et j’étais assez active dans des associations comme Girlz in Tech, Women Techmakers, Women in Tech – durant mes études de développement web et mobile à l’Ecole européenne des métiers de l’internet. En dernière année, par exemple, on n’était que 4 filles sur 30-35 dans la promotion 2018-2019. Je n’ai rencontré aucun problème, mes camarades de classe étaient plutôt bienveillants. Mais je me suis engagée pour changer le regard et insister sur le fait que le développement n’est pas qu’un milieu masculin, loin de là.
Pour intéresser les filles de première année au développement, on a organisé une série de cycles de conférences sur la mixité, l’innovation, sur les réalités virtuelles, les nouvelles technologies, le business model et les levées de fonds, et mis en place un programme de tutorat entre étudiants. Je suis toujours active chez Women Techmakers ou chez Women in Tech notamment, et j’ai pour objectif de lancer un programme de mentoring pour les femmes souhaitant se lancer dans la Tech.
Or, en jouant aux jeux vidéo, en m’intéressant à l’écosystème et surtout en raison du GamerGate, qui a eu lieu en 2014 (un mouvement de cyberharcèlement d’abord en Amérique mais qui a eu un écho ailleurs), j’ai compris que le monde du jeu vidéo était aussi concerné par ce manque de mixité…
Et vous avez ainsi intégré en 2018 l’association Game’Her. Quelles sont ses missions ?
Oui, j’ai voulu aider cette association. A ce moment-là, la structure soufflait sa première bougie. Membre du bureau, présidente, je suis également rédactrice en chef du site web de Game’Her : l’asso met en avant l’actualité des jeux vidéo et sensibilise sur les thèmes de l’inclusivité, de la diversité, de la mixité. L’objectif est de montrer notamment que les filles peuvent tout à fait se lancer dans le développement. Il s’agit de mettre en lumière par exemple des studios indépendants mixtes, comme Otterways, Crimson Tales ou des White Smoke Games, des structures qui n’ont pas forcément la force de frappe d’Ubisoft. Il s’agit de valoriser des personnes qui partagent nos valeurs. Je pense à Paula Neves (Chief Mobile Officer à Gazeus Game) ou à la comédienne Geneviève Doang. Elle réalise la voix de D.Va (Overwatch), d’Akali (League of Legends) et de Ciri (The Witcher). Leur carrière peut inspirer d’autres filles…
« Les comportements sexistes et toxiques freinent de nombreuses joueuses »
L’association organise aussi des Game’Her talks pour évoquer l’actualité ; sans oublier nos événements, comme la mise en place, chaque année, de tournois tels que le Game’Her Challenge, une ligue mixte pour jouer à League of Legends.
Les équipes mixtes sont vraiment utiles parce que chaque participant et participante peut ainsi se sentir à sa place. Il faudrait qu’il y en ait davantage dans les clubs de esport, mais aussi plus de tournois mixtes tout court, afin d’avancer.
Mais certaines joueuses n’osent pas forcément rejoindre ces tournois. Pour quelles raisons ? Quels blocages peuvent-elles ressentir ?
Je vois deux problèmes. D’abord, on peut parler du syndrome de l’imposteur, les filles ne se sentent pas à l’aise face aux joueurs du même niveau qu’elles. Ensuite, je pense aux comportements sexistes et toxiques qui freinent de nombreuses joueuses.
En ce qui concerne le syndrome de l’imposteur, comment passer outre ?
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