Si discrètes et pourtant essentielles… Les abeilles disparaissent sans bruit. Une disparition qui, en sous-main, pourrait engendrer des conséquences bien plus réelles que la raréfaction du pot de miel que l’on ouvre au petit-déjeuner. Des professionnels se mobilisent partout en France pour enrayer le phénomène. Nous en avons rencontré quelques-uns. Ils sont en colère.
Cet article est un extrait de l’entretien, publié dans Le Zéphyr n°11 – Sauver les animaux. Découvrez son sommaire, passez commande pour soutenir le média des aventures humaines. Lisez et offrez le magazine !
Si « les abeilles disparaissent de la surface du globe, l’homme n’aurait plus que quatre années à vivre…” Si la citation faussement attribuée à Albert Einstein a de quoi faire frémir par son catastrophisme, il n’empêche que le péril encouru par nos amies hyménoptères pourrait nous retomber dessus sans crier gare. Entre 1985 et 2005, plus de 25 % des populations d’abeilles ont purement et simplement disparu des jardins européens. Et, au vu du développement des produits chimiques comme de l’artificialisation des sols, il y a tout lieu de penser que la situation va continuer de se détériorer pendant les prochaines années. Certaines sources évoquent même 30 % de taux de mortalité dans les colonies.
En cause, l’activité humaine, bien entendu. Mais une activité plurielle. Dans l’agriculture, les exploitants continuent de déverser des hectolitres de pesticides et de fertilisants sur leurs parcelles. Il en résulte un appauvrissement des terres et une intoxication des plantes. Parmi les insectes, c’est l’hécatombe. Ajoutons à cela la raréfaction des zones sauvages et l’urbanisation croissante, et le paysage est complet.
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« Je n’ai pas signé pour ça »
Face à ce que l’on annonce comme inéluctable, des professionnels se mobilisent pour poursuivre leur activité et, surtout, renouer avec une apiculture plus saine et respectueuse de la nature. L’enjeu est double pour eux. Au-delà du maintien d’une profession qui, de facto, est en danger, ils entendent garantir la qualité d’un produit (le miel) directement impacté par les conditions de sa production.
“Moi, en vrai, j’ai pas signé pour ça.” Benoît a 33 ans. Il vit sur les hauteurs alpines et ce “ça” qu’il dénonce avec véhémence, c’est l’afflux de miels “trafiqués” d’un peu partout. Roumanie, République tchèque, Pologne, Portugal… « Des miels qui n’ont rien à voir les uns avec les autres et qu’on apporte parce que la production française ne peut plus suivre. Je ne sais pas comment ils fabriquent le leur, dit-il, mais ils ne le font sûrement pas comme moi.”
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Lancé dans l’apiculture il y a dix ans tout juste, il s’est fixé pour objectif d’avoir une production propre, comme il le dit. Cela implique des méthodes de travail douces, un rythme calqué sur celui de ses précieuses associées, l’abandon pur et simple de tout produit chimique dans la préparation et la conservation des bocaux. “C’est sûr que ce n’est pas aussi facile que de balancer des produits dans tout et n’importe quoi. Mais je peux donner mon miel à mes enfants sans risques.”
“Un massacre organisé, c’est terrible”
La disparition des abeilles, Benoît la voit se produire sous ses yeux. Depuis une décennie, il a perdu des insectes en une quantité innombrable. Entre les maladies venues de l’extérieur, l’influence des polluants et, maintenant, les dangers venus d’espèces invasives, il a perdu près de la moitié de son exploitation. “Sur le chiffre d’affaires, c’est évidemment terrible. 50 % de perte, c’est concret. Ça se chiffre. Ça veut clairement dire quelque chose. Mais, surtout, on parle de bêtes. 50 % de perte, dans mon métier, c’est un massacre organisé. C’est terrible”, glisse-t-il visiblement ému. / Jérémy Felkowski
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