Depuis fin avril, les bénévoles de l’Auberge des migrants battent le pavé pour rallier Vintimille et Calais. La grande marche, comme certains l’appellent, est plus qu’une procession, c’est un symbole d’une humanité qui refuse d’abdiquer face aux décrets et aux politiques anxiogènes.
Il en faut du courage, de l’abnégation et de l’altruisme pour marcher ainsi, la face offerte aux quatre vents. C’est pourtant la voie qu’on pris des centaines de bénévoles de l’Auberge des migrants. A une époque où il est si facile de détourner le regard, de suspecter et d’ostraciser, les membres de la structure ont décidé de faire front et de relier deux points emblématiques de la lutte contre l’isolement et l’oubli des réfugiés. Partis de la vallée de la Roya le 30 avril dernier, ils prévoient de rallier Calais le 7 juillet.
Durant leur périple, les bénévoles marquent des étapes dans une soixantaine de villes. Mais pourquoi ces simples citoyens marchent-ils ainsi à travers le pays ? Selon les organisateurs de cette grandes procession, l’enjeu numéro un est d’alerter l’opinion publique sur la nécessité de voir émerger une autre politique migratoire ; une politique plus digne et enfin cohérente avec les grands principes d’égalité et de respect des droits humains que la France se targue si souvent d’avoir inventé. Plus que les kilomètres affichés au compteur, ce sont les symboles qui jalonnent le parcours des membres de l’Auberge des Migrants. Et ce n’est pas un hasard s’ils ont choisi de s’élancer depuis la Roya.
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Héros ordinaire pour les uns, délinquant pour les autres
Là-bas, très loin dans les alpages, un homme s’est élevé contre l’absurdité des politiques migratoires en tendant la main aux plus démunis. Cédric Herrou, simple cultivateur, est devenu en quelques mois le porte drapeau d’un front humaniste qui gagne, jour après jour, de nouveaux soutiens. Décoré il y a quelques jours de la médaille de la ville de Grenoble par son maire Eric Piolle, l’agriculteur a aidé des réfugiés à passer la frontière franco-italienne et, surtout, à échapper aux dangers mortels de la montagne. A l’affiche de Libre, un documentaire réalisé par Marc Toesca, il se tient face aux caméras avec une double étiquette : celle de héros ordinaire pour les uns et de délinquant pour les autres.
Interrogé au départ de la grande marche par nos confrères de France Info, François Guennoc, un membre de l’association, appuyait alors sur l’importance de montrer qu’une autre France est possible et que, au cœur des régions, des gens sont encore prêts à tendre la main aux plus démunis. « Il faut que les Français restent à l’écoute de la problématique migratoire, de ce qu’on fait, de ce que fait le gouvernement également, assurait-il alors. On veut montrer qu’il existe aussi des Français qui aident et des Français qui revendiquent cette aide », a-t-il poursuivi.
Assurant, pour conclure, qu’il y aura un jour des retombées politiques, il assurait « qu’à un moment donné, la France regardera cette histoire de migration en face et adoptera une politique plus ouverte parce qu’on sait de toute façon que les gens arrivent, que ça coûte beaucoup plus cher de les empêcher de rentrer ou de les expulser que de les accueillir ».
Comme un clin d’œil prémonitoire à la trajectoire de Cédric Herrou et de ces centaines de bénévoles engagés pour aider les migrants à trouver un asile et un peu de tranquillité, le trio Fredericks-Goldman-Jones avait écrit quelques lignes en conclusion de son impérissable chanson Né en 17 à Leidenstads en disant : « Et qu’on nous épargne à toi et moi si possible très longtemps, d’avoir à choisir un camp. » Mais, au vu des événements, peut-être est-il désormais temps de se pencher sur la question pour tous les citoyens qui se sentent, de près ou de loin, concernés par la question des migrants.